Extrait de Futura-Sciences
L'étoile de Tabby, nommée en l'honneur de l'astrophysicienne Tabetha S. Boyajian qui a mené l'équipe ayant étudié l'étoile KIC 8462852, fait beaucoup parler d'elle depuis octobre 2015.
Il ne s'agit pourtant que d'une étoile a priori très ordinaire puisque encore sur la séquence principale et située dans la constellation du Cygne, à environ 1.480 années-lumière du Soleil. Avec une magnitude apparente de 11,7, elle n'est même pas visible à l'œil nu.
Mais sous le regard du télescope spatial Kepler, KIC 8462852 s'est révélée bien étrange.
Sa courbe de luminosité varie de façon plutôt erratique et surtout peut fortement diminuer, jusqu'à 22 %. Tout se passe comme si un corps céleste de taille importante transitait de façon apériodique devant l'étoile, bloquant sa luminosité. Il ne peut s'agir d'une autre étoile et pas non plus d'une exoplanète. Une planète de la taille Jupiter, en effet, ne provoquerait des baisses de la courbe de lumière de l'étoile de Tabby que d'environ 1 % et, surtout, périodiquement.
Une hypothèse fascinante a finalement été proposée.
Nous observerions la construction par une civilisation E.T. avancée d'une sphère de Dyson. Probablement sous forme de super IA et utilisant des machines de Von Neumann autoréplicatives, cette civilisation serait en train d'entourer son étoile d'une coque absorbant sa lumière pour conduire des projets qui nous sont insondables.
Membre éminent du célèbre Seti Institute, l'astronome Seth Shostak a cependant rapidement rappelé que cette idée était loin d'aller de soi.
« L'histoire de l'astronomie nous apprend que chaque fois que nous pensions avoir trouvé un phénomène dû à l'activité d'une civilisation extraterrestre, nous avions tort. » Il a toutefois ajouté : « Bien qu'il soit très probable que l'étrange comportement de cette étoile soit dû à la nature et pas à des aliens, il est prudent de le vérifier ».
Optical Seti branche Tabby sur écoute
Le cas de KIC 8462852 prend singulièrement du relief depuis le récent lancement par le milliardaire Yuri Milner du projet Breakthrough Initiative.
Il consiste à financer les recherches du programme Seti sur 10 ans à hauteur de 100 millions de dollars (environ 92 millions d'euros au cours actuel). Il comporte deux parties.
La première, et la plus importante, le Breakthrough Listen, consistera à tenter de détecter des émissions de civilisations E. T. dans le domaine radio mais aussi sous forme d'impulsions laser. L'idée que des extraterrestres pourraient préférer communiquer sur des distances interplanétaires, voire interstellaires, en utilisant des lasers est ancienne.
Elle a déjà été formulée par Schwartz et Townes en 1961, soit un an après l'invention du laser par Townes et deux ans après que Cocconi et Morrison ont proposé le concept de base du programme Seti.
Au début des années 1990 va ainsi voir le jour Optical Seti, c'est-à-dire la recherche de civilisations extraterrestres par d'autres moyens que les radiotélescopes. Il s'agissait plus précisément de chercher des émissions dans une bande spectrale correspondant grossièrement à la bande visible - d'où le nom d'Optical Seti. De nos jours, ces recherches sont conduites du proche infrarouge à l'ultraviolet.
En pratique, les observations de Radio Seti ont visé l'étoile de Tabby avec les 42 antennes de 6 m de diamètre de l'Allen Telescope Array situé environ 500 kilomètres au nord de San Francisco.
Des fréquences entre 1 Hz et 10 GHz ont ainsi été écoutées. Elles auraient pu révéler un signal spécifiquement consacré à manifester la présence d'une civilisation E.T. autour de KIC 8462852 pour les autres formes d'intelligences avancées dans la Voie lactée.
Mais selon les chercheurs, ces fréquences trahiraient aussi des faisceaux de micro-ondes utilisés par des vaisseaux interplanétaires.
Aucune émission n'a été détectée mais seules celles particulièrement puissantes et bien collimatées dans notre direction pouvaient l'être, ce qui veut dire qu'aucune conclusion ferme quant à l'inexistence d'E.T. occupés à construire une sphère de Dyson ne peut en être tirée.
Un article sur cette étude a été posté sur arXiv, ainsi qu'un second concernant l'Optical Seti.
Sur six nuits, entre le 29 octobre et le 28 novembre 2015, des observations ont été conduites en utilisant un télescope de type Newton de 50 cm de diamètre équipant le Boquete Optical SETI Observatory au Panama. Simultanément et au cours de trois de ces nuits, le Allen Telescope Array a fait de même.
Pour le moment, aucun signal n'a été détecté. On peut donc toujours penser que le comportement étrange de KIC 8462852 est bien dû à des fragments de grosses comètes... comme le pensent la plupart des astronomes.
Près de l’étoile KIC 8462852 : des comètes, oui, et non pas des extraterrestres
L’étrange étoile KIC 8462852 donne du fil à retordre aux astronomes qui l’étudient.
Un objet qui rôde autour d’elle a plusieurs fois bloqué une quantité importante de lumière : jusqu’à 22 %. C’est du jamais vu et personne ne sait vraiment expliquer ce phénomène irrégulier. S'agit-il d'une mégastructure développée par une civilisation extraterrestre ? Rien n'est moins sûr. De leur côté, les sondages dans l’infrarouge, en 2010 et 2015, n’indiquent pas de présence significative de poussières chaudes, résiduelles de collisions entre astéroïdes. La seule cause naturelle plausible pour l’instant serait celle d’un cortège de comètes.
Que cache l’étrange étoile KIC 8462852, s'interrogeait-on à la mi-octobre en apprenant l'existence d'occultations irrégulières de sa lumière à des niveaux encore jamais enregistrés.
Un phénomène survenu surtout à deux occasions, sur des périodes de plusieurs jours, en 2011 et en 2013, comme l'a observé le satellite Kepler qui recherche les exoplanètes par transit (en passant devant leur étoile hôte, les planètes se trahissent en faisant baisser sensiblement la luminosité de l'astre).
Une série d'objets ont en effet bloqué jusqu'à 22 % de la luminosité de cette étoile un peu plus chaude que le Soleil, distante de 1.500 années-lumière. Les astronomes n'avaient encore jamais vu cela auparavant : d'ordinaire, une planète en transit n'infléchit pas l'éclat de son étoile parent au-delà de 1 %.
Pour expliquer ce phénomène, les chercheurs ont bien sûr songé à diverses causes naturelles comme une naine brune compagne, de grandes taches sombres sur l'étoile ou la collision d’astéroïdes et de planétésimaux dans son environnement, mais aucune n'est apparue assez solide pour triompher.
Les observations menées dans l'infrarouge avec le satellite Wise (Wide-Field Infrared Survey Explorer) afin de mettre en évidence d'éventuels nuages de poussières et de débris provoqués par les chocs de ces petits corps sombres n'ont rien démontré dans ce sens. Cependant, à sa décharge, il ne scrutait le ciel dans cette direction qu'en 2010, soit bien avant les premières anomalies détectées. Pour l'équipe qui a étudié le cas particulier de KIC 8462852, l'hypothèse la plus vraisemblable retenue est un cortège de comètes.
En alternative, une interprétation plus artificielle -- qui depuis a fait couler beaucoup d'encre -- fut proposée : ces importantes occultations irrégulières pourraient être produites, après tout, par une mégastructure créée par une civilisation extraterrestre technologiquement très avancée (type sphère de Dyson) qui enveloppe l'astre afin d'en puiser l'énergie... C'est tentant, mais la récente « mise sur écoute » durant un mois de cette étoile par l'institut Seti n'a rien donné qui puisse créditer ce scénario.
Pas de poussières chaudes détectées dans l’infrarouge
Dans l'espoir de percer ce mystère sans équivalent, de nouvelles observations ont été conduites en 2015 dans l'infrarouge. Cette fois avec le télescope spatial Spitzer, coutumier de la recherche de disque de poussière autour d'étoiles.
Mais, comme pour les précédentes recherches menées avec Wise avant les évènements de 2011 et 2013, cette campagne n'a rien donné de tangible. Aucun signal témoignant d'un éparpillement de poussières chaudes, comme on pourrait s'y attendre après une série de violentes collisions.
Finalement, à défaut d'arguments pour le scénario des astéroïdes qui s'entrechoquent, l'équipe reste sur celui d'un bataillon de comètes, autrement dit des corps froids qui, en passant devant KIC 8462852 autour de laquelle ils gravitent, ont provoqué ces deux occultations exceptionnelles.
Il est possible qu'il y ait un gros chef de famille suivi de plus petits sur une orbite très longue et elliptique. Le premier serait responsable de l'anomalie de 2011 et le reste de celle qui s'est produite en 2013.
« C'est une étoile étrange, commente Massimo Marengo, de l'université d'état de l'Iowa, principal auteur de cette étude qui a été acceptée pour publication dans la revue the Astrophysical Journal Letters. Cela me rappelle quand nous avons découvert les pulsars. Ils émettaient d'étranges signaux que personne n'avait vus avant, et le premier découvert s'appelait LGM-1 pour Little Green Men [« petit homme vert » en français, NDLR] ».
En effet, en attendant des explications à ce signal régulier détecté en 1967, le phénomène devint célèbre et fut surnommé ainsi par les radioastronomes. Puis les causes naturelles furent établies. « Nous ne savons pas encore ce qui se passe autour de cette étoile, mais cela la rend très intéressante », conclut Massimo Marengo. L'affaire n'est toujours pas classée.
Écrire commentaire