Résumé
“L’objectif de cette thèse de doctorat est de faire un état des lieux de ce qu’il est possible de dire à l’heure actuelle à propos du soucoupisme du point de vue des sciences humaines. Celui-ci peut être défini comme étant la nébuleuse qui s’est constituée autour de la croyance dans l’hypothèse extraterrestre pour expliquer le phénomène OVNI. Nous présenterons le modèle sociopsychologique, une tentative d’expliquer les observations, les enlèvements et les vagues de manière prosaïque. Il relève du projet général de la psychologie anomalistique, qui cherche à expliquer le paranormal sans invoquer de processus paranormaux.
Nous déconstruirons le discours ufologique en nous basant sur notre observation participante de cette communauté. Une attention toute particulière sera portée à la vague belge (1989-1992), à propos de laquelle nous argumenterons qu’il est possible de l’expliquer par une illusion de masse.”
Table des matières
Commentaire du MUFON FRANCE
J’ai découvert cette semaine la thèse de doctorat de Jean Michel Abrassart, en cherchant de la documentation sur le sacro-saint modèle socio-psychologique dont une partie des chercheurs (qu’on qualifie souvent de zetéticiens ou sceptiques, encore que ces deux termes pour en qualifier certains mériteraient d’être débattus) se font les hérauts.
Et il faut bien admettre, d’accord ou pas, le propos est ici tenu intelligemment et la démonstration souvent efficace, et en tout cas source de réflexion. J’irais même plus loin, je pense que tout ufologue devrait (aussi) lire ce type de recherche. N’être pas d’accord sur tout est une chose, mais je pense que l’équation 1+1 doit tendre vers 3, pas vers 0. Mais c’est un autre sujet.
Bref, un pavé d’environ 200 pages, dont je vous invite à prendre connaissance, à lire avec l’esprit ouvert. Je partage quelques lignes du mémoire qui me paraissent particulièrement pertinentes.
Si une grande partie du monde académique tend encore à voir l’étude du paranormal comme étant un sujet peu sérieux, nous pensons que cette situation a des conséquences dommageables d’un point de vue sociétal.
Certains auteurs voient dans notre culture une montée de l’irrationnel qui s’accompagnerait d’une croyance de plus en plus importante dans le paranormal. Le physicien Henri Broch (1985) défend par exemple cette position et argumente sur cette base qu’il faudrait enseigner la pensée critique dans le grand public sous la forme de ce qu’il surnomme la zététique.
Il est important ici d’éviter la confusion entre les pseudosciences et le paranormal. L’important n’est pas tant l’existence de ces phénomènes en tant qu’expériences exceptionnelles, mais les explications scientifiques de ceux-ci. Les sorties hors du corps existent. Le débat scientifique, et dans ce cas-là aussi philosophique, tourne autour de savoir s’il est possible d’expliquer ce phénomène de manière purement matérialiste ou si au contraire le dualisme est nécessaire pour pouvoir en rendre compte.
De même, le phénomène OVNI existe (en ce sens que des gens rapportent avoir observé des objets qui volent et qu’ils n’ont pas su identifier). La vraie question est de savoir s’il est possible d’en rendre compte de manière réductionniste ou non. Il y aura toujours des gens qui croiront dans le paranormal du simple fait de la prévalence de ces expériences dans la population.
Un problème nous semble être bien plutôt le faible degré d’engagement de la communauté académique sur ces sujets : comme les scientifiques et les philosophes n’occupent pas le terrain de ces débats, d’autres le font malheureusement à leur place… Ces personnes manqueront généralement non seulement des compétences nécessaires, mais auront aussi bien souvent moins d’honnêteté intellectuelle. Le monde académique n’est pas parfait, loin de là, mais il a l’avantage de présenter certains mécanismes d’autocorrections tels que la revue par les pairs, etc.
Il nous semble aussi qu’avant de vouloir éduquer le public à propos de l’irrationalité de la croyance au paranormal, il serait tout d’abord préférable de normaliser ces sujets du point de vue de la recherche scientifique. On ne peut pas activement décourager (consciemment ou inconsciemment) l’étude du paranormal par les jeunes chercheurs et espérer que cela n’ait pas de conséquences sur les représentations que le grand public se fait de ces sujets. Même si nous admettions que vouloir éradiquer (ou tout du moins diminuer) la croyance au paranormal était un objectif pour lequel il valait la peine de militer, les chances d’y arriver sont certainement tout aussi faibles que celles de pouvoir faire disparaître les croyances religieuses.
En effet, tout comme la religiosité, la croyance au paranormal fait partie de la nature humaine. Par contre, au vu de l’intérêt pour ces sujets dans le grand public, il nous semble que les scientifiques et les intellectuels ont le devoir de se pencher sur ces questions.
Jean Michel Abrassart
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